La décarbonation est devenue un sujet « presque » central dans le secteur de l’aéronautique, même si l’impact de l’aviation légère reste mesuré en termes d’émissions. Les vieux moteurs américains auront du mal à s’y prêter. Il existe sur le marché d’autres motorisations qui s’accorderaient avec une action sensible vers la décarbonation, c’est le cas notamment des petites turbines et plus particulièrement celle de l’entreprise Turbotech, basée à Toussus le Noble (78). Pour tenter d’apporter une solution à notre aviation légère, l’entreprise Icarius Aerotechnics, adhérente au GIPAG France et installée à Gap en collaboration avec Turbotech s’est lancée dans le montage d’une de ces turbines sur un DR400. À l’occasion du salon Aero 2023, un modèle de Robin récent avait été aperçu avec cette motorisation. Il n’y avait pas eu de suite. Icarius Aerotechnics a repris l’idée. Cette installation est un partenariat entre l’atelier de maintenance et Turbotech. L’objectif est d’obtenir un STC pour le montage d’une turbine non certifiée sur un appareil certifié. Icarius Aerotechnics est très certainement le partenaire le mieux placé pour cette installation ; l’entreprise est spécialisée dans la maintenance des avions à turbine Pilatus. Elle est notamment titulaire d’un STC pour le montage d’une turbine plus puissante sur les PC7. La voie réglementaire ne lui est donc pas inconnue.
« C’est possible, à condition d’avoir les bons arguments à soumettre à l’EASA, pour cela, il faut s’entourer des gens compétents et notamment d’un bureau d’études efficace. Après les phases de test, nous verrons bien si cette installation est pertinente. Le DR400 est l’avion le plus répandu, mais nous envisageons aussi d’autres cellules connues, le Cessna 172 et le PA 28. L’aviation générale a besoin de trouver des solutions pour faire face à la disparition de l’AvGas, mais également face au problème de disponibilité des pièces de moteur. Nous sommes dans une logique vertueuse qui apporterait une réponse à la problématique environnementale qui se pose à l’aviation générale. À ce titre, nous sommes sur le point d’obtenir une subvention du fond vert de France Nation Verte soutenue par l’ADEME, ce qui devrait couvrir une partie du coût du STC », explique Corinne Fitzgerald, la dirigeante d’Icarius Aerotechnics.
L’essai depuis plusieurs mois d’un ULM XL8 à turbine sur la plateforme de Gap l’a un peu plus confortée dans son choix. Les témoins de l’expérimentation parlent d’un appareil exceptionnellement silencieux, les pilotes soulignent la simplicité de mise en œuvre et une adaptation performante de la turbine à l’appareil. Pour Corinne Fitzgerald, cette turbine a deux gros avantages : elle est polycarburant, donc, quand l’Avgas aura disparue, on pourra toujours utiliser le jet-A1. Ensuite, elle a un TBO de 3000 heures et un cycle de maintenance réduite. Le montage permet également de continuer à faire voler des cellules un peu anciennes, d’autant que le DR400 est l’avion que l’on peut presque réparer à l’infini. La Fédération française aéronautique (FFA) apporte tout son soutien à l’opération en fournissant la cellule d’un DR400 de 160 ch. Pour le moment, on ne parle pas encore de coût précis, mais la turbine s’affiche à plus de 100 000 euros pour les ULM. À cela, il faut ajouter l’avion, le coût d’amortissement du STC et l’intervention de l’atelier. Corinne Fitzgerald reconnait qu’il y aura un coût non négligeable, mais il y aura également des gains sur l’exploitation, sans parler du confort d’utilisation.