La pénurie des mécaniciens touche depuis longtemps le secteur de l’aéronautique et plus sévèrement le secteur de l’aviation générale. Sous ce registre, on range la petite aviation d’affaires, celle dévolue au travail aérien, à la formation des pilotes et celle appartenant aux propriétaires privés. Cette situation présente un risque économique et systémique majeur : pas de mécaniciens, pas d’avions, et un frein possible également à la formation des pilotes professionnels. Françoise Horiot, présidente du comité stratégique du Groupement des industriels et professionnels de l’aviation générale (GIPAG France) et ex-dirigeante de Troyes Aviation, pointe cette carence depuis des années. Elle était l’une des intervenantes d’un atelier lors des États de l’Air, une manifestation organisée, le 3 octobre, par l’association Enac Alumni. Le thème de l’atelier était la maintenance du futur.
Françoise Horiot, invitée pour la première fois à cet événement, a rappelé le contexte. « Cette carence est un vrai sujet de fond. Le métier est très peu connu du grand public, quand il ne souffre pas d’une mauvaise image. Depuis des années, le GIPAG France s’efforce de promouvoir ce métier de mécaniciens et tous ses développements. Nous participons à des salons, des journées portes ouvertes ; toutes les occasions sont bonnes pour en parler ». La dirigeante a également expliqué que la formation reste encore trop longue et trop complexe, ce qui peut rebuter la jeune génération. « Il faut au minimum cinq ans pour former un mécanicien avec une licence quand il faut seulement deux ans et demi pour un pilote d’avion. Personne ne comprend cette différence. Nous avons bien essayé de faire valoir ce point de vue auprès de l’EASA, mais nous n’avons pas obtenu gain de cause, l’aviation générale est traitée comme l’aviation commerciale. Cette inflexibilité à l’écoute de nos arguments plombe depuis des années un secteur économique indispensable pour le domaine aéronautique. Nous avons bien essayé également de trouver des passerelles entre les formations militaires et civiles afin de pouvoir embaucher ceux qui sortent de l’Armée. Là encore, il était simple de trouver une adéquation le savoir-faire des gens qui entretiennent des avions de chasse ou de transports et nos besoins. La réglementation scrupuleusement respectée par nos autorités a clairement fait échouer cette tentative en faisant la fine bouche sur les différences de parcours de formation civile et militaire ». À cette difficulté de trouver des mécaniciens, s’ajoute celle de trouver de bons profils. Les quelques candidats en formation aujourd’hui sont parfois très peu concernés par la rigueur qu’exige le métier, et cela peut impacter à terme la sécurité des vols. Très clairement, le milieu aéronautique de cette petite aviation (mais également la grande) attend que l’État notamment se saisisse de cet enjeu majeur.
Il existe un risque pour cet écosystème : réduction des capacités, disparitions des savoir-faire, fermeture d’entreprises pourtant indispensables… En attendant, Françoise Horiot a proposé, lors de ces États de l’Air, une idée lumineuse pour promouvoir cette profession et la faire sortir d’une forme d’anonymat. Il existe bien des diplômes du meilleur pâtissier ou du meilleur charcutier de France, pourquoi ne pas créer également une distinction du meilleur mécanicien de France ? Cela existe aux USA et les résultats sont probants. Cette idée a, en tout cas, vivement intéressé à la fois Aéroport de Paris mais également l’Organisme pour la Sécurité de l’Aviation Civile (OSAC). Espérons que la voix de Françoise Horiot ait porté au milieu d’un aréopage de grands professionnels de l’aérien.